Lot n°60 – René-Yves CRESTON (1898-1964) Important globe terrestre Faïence émaillée polychrome rehaussée à l’or Manufacture Henriot Quimper, 1931 Diam. 42 cm x Haut. 40 cm Provenance de la famille de l’artiste.
C’est à l’occasion du Pardon du Folgoët en 1923, que de jeunes artistes posent les bases du mouvement de renouveau des arts décoratifs breton : Ar Seiz Breur (les sept frères).
La production de ce mouvement a été accompagnée par les manufactures HB (la Grande Maison) et Henriot, à partir des années 20.
Depuis plus d’un an, Me Carole Jézéquel (étude Rennes Enchères) et Tangui Le Lonquer (expert) travaillent sur une vente du centenaire du mouvement (1923-2023).
Ils ont été rejoints dans l’aventure par la SVV Thierry-Lannon (Brest et Lorient) et Salorgues Enchères (Nantes et la Baule).
L’évènement se concrétise au mois de juillet 2023, avec une exposition des travaux des membres du mouvement, au Parlement de Bretagne à Rennes (du 8 au 13 juillet).
La vente se tiendra à l’Hôtel des Ventes de Rennes (32 Place des Lices), le 13 juillet 2023 à 14 h.
Lot n°95 – René-Yves CRESTON (1898-1964) Troménie, les porteurs de bannière Sculpture en faïence émaillée polychrome Manufacture Henriot Quimper, vers 1935 Titrée «Troménie» à la base, Monogrammée «RYC» et signée «Henriot Quimper» au revers Haut. 40 cm x Larg. 34 cm x Prof. 12,5 cm.
Lot n°39 – Jeanne MALIVEL (1895-1926) Projet pour un service en faïence de Quimper. Encre et crayolor sur papier, vers 1924/1925. Portfolio comprenant 12 études pour un service en faïence émaillée polychrome. La jaquette titrée : «Ar Seiz Breur – service faïence – décor mauve et jaune» et marquée du tampon des Seiz Breur de juin 1924.
Ar Seiz Breur 1923-2023 : le centenaire . Vente le jeudi 13 juillet 2023 à 14H00 (287 lots). Exposition publique gratuite au Parlement de Bretagne du samedi 8 au jeudi 13 juillet.
Lot n°96 – René-Yves CRESTON (1898-1964) Grand groupe de porteurs de bannières ou «Grande Troménie» Sculpture en faïence émaillée en blanc Manufacture Henriot Quimper, 1935 Signé au revers du monogramme «RYC» et «Henriot Quimper» Petits défauts de cuisson Haut. 41 cm x Long. 60 cm x Prof. 20 cm.
Le film documentaire de Laurence-Pauline Boileau sera diffusé jeudi 22 juin 2023 à 21 h, sur les chaînes bretonnes (TVR, TébéO et TébéSud).
Nous aurons le plaisir de retrouver avec émotion le témoignage de Magdeleine Le Bouffo (1926-2016), qui perpétuait le souvenir de Jeanne Malivel dans sa galerie de la Table ronde à Loudéac.
Ce documentaire est un projet de longue haleine. Laurence-Pauline Boileau était venue présenter son travail, lors de l’assemblée générale de l’association des Amis de Jeanne Malivel en avril 2018, au Musée de la Faïence.
Vous retrouverez dans ce film les plus éminents spécialistes du mouvement des Seiz Breur, ainsi que des images captées lors de l’exposition consacrée par le Musée de la faïence en 2018.
Bande annonce du film : « Jeanne Malivel, un soleil se lève ».
JEANNE MALIVEL, UN SOLEIL SE LEVE un film documentaire de Laurence-Pauline Boileau 2023 – 60 minutes – production par RnB!FILMS
Dans le cadre du centenaire du mouvement artistique breton, une vaste campagne d’estimation d’objets se déroule en Bretagne. Jeudi 27 avril 2023, Quimper (Finistère) accueillait la dernière étape. Ambiance.
Sandy Surmely, commissaire-priseur, et Bernard Jules Verlingue, du musée de la faïence, en pleine expertise, jeudi 27 avril 2023 à Quimper (Finistère).
Jeudi 27 avril 2023. Le petit crachin n’empêche nullement une affluence soudaine à l’ouverture des portes du Musée de la faïence. Des personnes arrivent avec des trésors enveloppés dans du papier bulles, transportés avec précaution dans des cartons et des sacs plastiques.
Bernard-Jules Verlingue, conservateur du musée, examine avec son œil d’expert les objets qu’on lui présente. Cette journée d’estimation est la dernière d’une longue tournée, entamée il y a neuf mois dans toute la Bretagne, dans le cadre du centenaire du Seiz Breur.
Marie Le Bot-Mantran, commissaire-priseur et Gwénaël Le Berre qui dévoile ses « trésors ».
Des commissaires-priseurs ont travaillé ensemble. Maître Carole Jézéquel, de Rennes enchères, a réuni autour d’elle Salorges enchères (Nantes, La Baule), représenté par Marie Le Bot-Mantran et Thierry-Lennon (Brest, Lorient) avec Sandy Surmely.
Ces trois maisons de ventes ont ratissé le territoire en vue d’une exposition, du 8 au 13 juillet 2023, au Parlement de Bretagne, à Rennes, et d’une grande vente, le 13 juillet 2023, toujours à Rennes.
Fauteuils de Jeanne Malivel
« Le mouvement n’est pas forcément connu, reconnaît Carole Jézéquel, des personnes peuvent être en possession de statuettes en faïence par exemple, sans connaître le nom de son auteur, savoir que c’est une signature du Seiz Breur. »
Lors des journées d’estimation, les experts ont découvert de belles choses : « Un grand nom, comme René-Yves Creston et ses représentations de Nominoë, ou encore de magnifiques fauteuils de Jeanne Malivel. »
Si l’on parle beaucoup de faïence à Quimper, et c’est normal, il faut rappeler que les artistes du Seiz Breur travaillaient dans toutes les disciplines : sculpture, gravure, textile, typographie, mobilier…
Jeudi 27 avril 2023, au musée de la faïence, à Quimper (Finistère), c’était la dernière étape bretonne d’estimations d’objets du mouvement des Seiz Breur.
Maître Jézéquel se félicite de fédérer d’autres maisons de ventes aux enchères autour de ce projet qui va au-delà du simple événement commercial, à l’image, dit-elle « de la fraternité entre artistes du Seiz Breur ». Elle ajoute : « Éveiller la curiosité et sauvegarder le patrimoine, c’est important à nos yeux. »
Même 100 ans après sa création, le Seiz Breur reste résolument moderne et inspirant : « Regardez l’inspiration de Nolwen Faligot et ses tissus, de certains céramistes, et même d’une pochette de disque s’inspirant d’un motif de Creston. »
Du local
Parmi les personnes qui font la queue pour avoir un avis sur leurs « trésors », un couple malheureux présente une belle assiette de la Bretagne libérée datée de 1944 avec une bretonne libre de ses chaînes. Elle est tombée par terre, en arrivant au musée. « Un objet d’intérêt muséal, affirme Tangui Le Lonquer. Une restauration entre 600 et 800 € est méritée. »
Gwénaël Le Berre est venu en connaisseur et en voisin. Avec des objets et des documents comme une photo d’une maquette d’un monument destiné à Penmarc’h conçu par François Bazin. « Mon père était Marc Le Berre, du magasin À la ville d’Ys, sur les quais de l’Odet. »
Tangui Le Lonquer est sollicité par des particuliers. Avoir une idée de la valeur des objets, pas forcément s’en séparer. Quoique.
« Nous avons eu le cas d’une personne, dans le cas d’une succession dont les trois enfants étaient intéressés par une pièce. La personne en question l’a vendue pour partager l’argent de la vente avec ses enfants, c’était plus facile ! »
Pour le spécialiste du Seiz Breur, les personnes connaissent bien l’origine des objets qu’ils possèdent, « avec Internet, on peut se renseigner… »
Un mouvement qui reste actuel. Au niveau artistique. Mais pas uniquement. « Dans le mouvement sociétal actuel d’écologie, de consommation locale, les artistes du Seiz étaient des artistes locaux, tout comme leurs réseaux de diffusion et de production. »
Fondé en 1923, le mouvement des Seiz Breur fête ses 100 ans. Conservateur du patrimoine honoraire et auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet, Pascal Aumasson décrypte pour nous cinq pièces caractéristiques de ce mouvement, symbole de la naissance du style Art déco en Bretagne.
Photo de groupe prise à Douarnenez en 1935. À droite, René-Yves (debout) et Suzanne Creston (assise) ; assis à gauche de Suzanne : Youenn Drezen ; debout au milieu (chemisette et cravate) : Pierre Péron ; à gauche, Jakez Riou et son épouse.
En septembre 1923, sept jeunes artistes fondent le mouvement des Seiz Breur (Les sept frères en gallo) avec pour ambition d’embellir le quotidien de leurs contemporains avec un art décoratif breton, moderne et populaire.
Prenant le contre-pied de leur époque, ils veulent épurer, simplifier, styliser et introduire des motifs nouveaux dans tous les domaines du décor domestique : les meubles, la faïence, les textiles ou la typographie.
Bientôt, ils seront près de cinquante artistes, artisans, musiciens, architectes à s’attacher à un « art national » qui, jusqu’en 1947, balance entre admiration pour le passé (les arts populaires de Bretagne comme l’art celtique d’outre-Manche) et élan vers les audaces les plus modernes d’Europe.
Historien de l’art, Pascal Aumasson est l’auteur de plusieurs ouvrages sur le mouvement des Seiz Breur.
Historien de l’art, Pascal Aumasson a également été pendant 35 ans conservateur de plusieurs musées en Bretagne. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages : Suzanne Candré-Creston, à la source des Seiz Breur, paru le 24 mars 2023, et Seiz Breur, Pour un art moderne en Bretagne, réédité chez Locus Solus. Voici cinq œuvres décryptées par Pascal Aumasson :
Le mobilier
Bahut réalisé par Joseph Savina (Seiz Breur en 1929) dans son « atelier d’art celtique » à Tréguier. 1936-1938. Collection : Musée de Bretagne, Rennes.
Commandé en 1936 par la veuve de Yann Sohier, instituteur militant pour la langue bretonne décédé en 1935, ce meuble présente en façade le logo que l’instituteur avait adopté à la une de la revue Ar Falz.
La spirale celtique à quatre branches (hevoud) inscrite dans un cercle constitué de triangles appelés « dents de loup » et une faucille (ar falz en breton) en font un meuble à message : ce motif de l’hevoud intéressait les nationalistes bretons de longue date. Il est rehaussé d’une double série de clous décoratifs de tapissier, rappel des clous employés autrefois sur les façades de meubles bretons. Le plateau débordant est quant à lui typique du style Art Déco.
Une vaisselle réinventée
Projets de faïences de Jeanne Malivel, vers 1925.
Loin des motifs du petit Breton en costume traditionnel qui remplissent encore la vaisselle de cette époque, l’artiste Jeanne Malivel simplifie l’ornementation.
Sur ces croquis préparatoires, elle concentre les motifs à la périphérie des pièces et restreint ses couleurs au jaune et au noir. Elle réserve celles-ci à ce qui est touché par les doigts : ces anses enroulées, qui constituent une signature Art Déco.
Des tissus imprimés
Étude pour un tissu imprimé de Suzanne Candré-Creston, en 1929. Collection particulière.
Portée par l’envie d’apporter de la couleur et des motifs dans les intérieurs domestiques, Suzanne Candré-Creston imagine des impressions sur tissus, forme de décoration largement méconnue jusqu’alors en Bretagne.
Ses projets fourmillent de bandes courbes et répétées, de combinaisons denses de formes imbriquées et de couleurs puissantes. Leur répétition produit un effet optique dans l’esprit des peintures d’artistes comme Robert et Sonia Delaunay, qui lui sont contemporains.
Des faïences Henriot
Pièce de forme conçue par René-Yves Creston et réalisée par les faïenceries Henriot, à Quimper, en 1933. Collection du musée départemental breton, à Quimper
Cet hommage à un souverain du haut Moyen-Âge breton, Nominoé, est significatif de la passion des Seiz Breur pour les hauts faits de l’histoire ancienne de Bretagne, surtout dans sa dimension d’autonomie régionale ou d’opposition à la couronne de France.
La stylisation des formes et l’emploi de couleurs restreintes sont une signature typique du mouvement Seiz Breur.
Une architecture novatrice
L’intérieur de la chapelle de l’institution Saint-Joseph, à Lannion. Conception James Bouillé, 1935-1938.
À Lannion, la chapelle de l’institut Saint-Joseph concentre l’esprit Seiz Breur. Ce sanctuaire conçu par l’architecte James Bouillé, un temps membre du mouvement, fait un usage audacieux des possibilités techniques et plastiques offertes par le béton. Ses voûtes en forme d’arcs paraboliques amortis sur de courtes piles définissent un espace sacré tout en transparence et en lumière.
Une vaste fresque signée Xavier de Langlais et des vitraux réalisés par Rual participent à l’harmonie de la nef, dont les proportions sont neuves en Bretagne dans les années 1930.
Symbole de la naissance du style Art déco en Bretagne, le mouvement des Seiz Breur a 100 ans. Le spécialiste revient sur l’histoire de ce groupe de jeunes artistes, résolus à moderniser l’art breton.
Conservateur du patrimoine honoraire et historien de l’art, Pascal Aumasson est l’auteur de plusieurs ouvrages sur le mouvement des Seiz Breur.
Entretien
Pascal Aumasson, conservateur du patrimoine honoraire et auteur de plusieurs ouvrages sur le mouvement des Seiz Breur.
En quoi le mouvement des Seiz Breur se distingue d’une école ?
On ne peut pas parler d’école ou d’académie, parce que ce mouvement des Seiz Breur n’impose pas de style : chacun des membres peut s’exprimer dans son style propre, à condition que cela corresponde aux principes qu’ils adoptent tous : être breton, moderne et populaire.
En quoi innovent-ils ?
Ils prennent le contre-pied d’une façon de concevoir,à leur époque le mobilier et la faïence. Ils rejettent radicalement (et avec un humour cinglant) les meubles Henri II, par exemple, truffés de petits personnages en costumes bretons. En matière de faïence, ils rejettent le surplus de décors hérités du début du XIXe siècle. Ils veulent épurer, simplifier, styliser et introduire des motifs nouveaux.
Les femmes y ont joué un rôle important ?
Jeanne Malivel et Suzanne Candré-Creston, femme d’René-Yves Creston, y jouent un rôle essentiel. Suzanne Candrée-Creston est d’une avantgarde audacieuse, artistiquement très équilibrée. Son objectif est de faire connaître en Bretagne toutes les avant-gardes qui se développent, que ce soit en Allemagne ou du côté du théâtre Dada. Jeanne Malivel, elle, invente des formes avec motifs épurés, ce qui se remarque surtout dans ses faïenceries, ses broderies ou ses projets de meubles, avec des décors presque graphiques.
Le fauteuil imaginé en hommage à Nominoé par le duo René-Yves Creston et Gaston Sébilleau.
Aujourd’hui, que nous reste-t-il des Seiz Breur ?
Le mouvement a duré de septembre 1923 jusqu’en 1947, passant d’un effectif de sept artistes à plusieurs dizaines. Les Seiz Breur ont surtout eu un rôle dans le domaine des arts décoratifs, avec un impératif : embellir le quotidien de leurs contemporains. Il en reste une manière de prendre appui sur des racines basses bretonnes et de les assumer d’une manière moderne. Ils voient le futur en se basant sur les usages décoratifs les plus anciens.
On ne peut pas oublier la part d’ombre du mouvement…
Il y a un gap entre ce qu’on dit, « les Seiz Breur ont collaboré », et la réalité : certains l’ont fait mais ils se sont égarés seuls. Au début de la guerre, sous la direction de Creston, le mouvement a décidé de ne pas prendre parti. Cela n’a pas empêché un certain nombre de ses membres, à titre individuel, de penser que Vichy et l’Allemagne nazie allaient apporter à la langue bretonne un espace que la République française lui refusait.
Les mosaïques d’Isidore Odorico, les peintures à fresco et le riche mobilier inspiré par le mouvement Seiz Breur sont à découvrir à la chapelle Art-déco, à la maison Saint-Yves, à Saint-Brieuc.
C’est malgré tout ce qui a entraîné leur chute ?
À la fin de la guerre, l’amalgame entre culture bretonne, langue bretonne et collaboration a affecté les Seiz Breur, à leur corps défendant. Cet amalgame a mené à un grand oubli, qui a duré jusque dans les années 2000. De plus, les musées bretons n’ont pratiquement acquis aucune œuvre des Seiz Breur avant les années 1990. Mais il est fréquent qu’une période ne soit pas respectée par ses contemporains. Prenons l’exemple de l’école de Pont-Aven : pas un musée breton n’a acquis d’œuvres de ses membres du vivant du groupe. Le mouvement des Seiz Breur a également été écrasé par des formes artistiques franchement plus modernes : le cubisme ou l’abstrait étaient mieux portés par le marché de l’art que les arts décoratifs bretons.
Historien de l’art, Pascal Aumasson a également été pendant 35 ans conservateur de plusieurs musées en Bretagne. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages : Suzanne Candré-Creston, à la source des Seiz Breur, à paraître le 24 mars 2023, et Seiz Breur, Pour un art moderne en Bretagne, qui sera bientôt réédité chez Locus Solus.