Göring, homard, oiseaux : les insolites du musée de la faïence de Quimper (Ouest-France).

Le musée de la faïence de Quimper est un incontournable. Pour autant, connaissez-vous les petites particularités et anecdotes sur les différentes pièces exposées ? Nous vous proposons un rapide tour dans ce joyau d’histoire.

Jérémy Varoquier
Jérémy Varoquier, assistant de Bernard Verlingue, conservateur du musée de la faïence à Quimper.

Le musée de la faïence de Quimper accueille une exposition temporaire sur les merveilles de la faïencerie Porquier-Beau, jusqu’au 1er octobre 2022.

Elle met à l’honneur plus de 650 aquarelles accompagnées des faïences arborant le même décor. Rapide tour d’anecdotes rocambolesques.

1. Quand Hermann Göring a failli voler Henriot

Nul n’ignore le vif amour, ou plutôt l’obsession malsaine, du régime nazi pour les œuvres d’art. L’ombre du maréchal Hermann Göring, haut dignitaire nazi, continue à planer sur l’histoire de certaines pièces. Au musée de la faïence, Jérémy Varoquier, assistant du conservateur, interpelle sur un plat de Pierre Rocuet, peint avant 1922. « II se raconte que le maréchal Göring avait flashé dessus, qu’il souhaitait l’embarquer. Alors, la faïencerie Henriot aurait caché toutes ses pièces,pour éviter qu’elles soient volées par les nazis. »
Si l’anecdote a le mérite d’attirer l’oreille, « c’est une légende, une histoire qui traîne. On ne sait pas réellement si c’est avéré », précise l’assistant. On sait pourtant qu’à Paris, Göring s’était intéressé au musée du Jeu-de-Paume, où il déposait en transit les œuvres spoliées, ses « prises de guerre », constituant l’une des plus grosses collections d’art jamais pillées dans l’histoire.

Homard Porquier-Beau
Une assiette arbore un homard. cependant, ne trouvez-vous pas que quelque chose cloche ? regardez ses pattes…

2. Un homard extraordinaire

Observez attentivement cette assiette. Rien ne vous étonne ? Au contraire, grand amateur de fruits de mer ou passionné de la biodiversité marine, vous percevez une certaine déformation du homard ?
En effet, d’ordinaire, les pattes du crustacé sont placées bien plus en avant. Sur cette pièce, elles sont placées à l’arrière. « Un important décalage, souligne Jérémy Varoquier. C’était peut-être pour faire rentrer le motif dans l’assiette, ou peut-être une boutade de l’auteur, on ne sait pas… »
Cette pièce, réalisée par Camille Moreau, qui a rejoint la manufacture Henriot en 1891, fait partie d’une large collection de peintures de scènes marines. Autre anecdote : l’homme, formé par Alfred Beau, devint à sa retraite le premier pilote du canot automobile reliant Quimper à Bénodet et Beg Meil.

René Quillivic
La dame de Fouesnant.

3. La femme de Fouesnant

Remontons dans le temps : à la fin de la Première Guerre mondiale, afin de se souvenir du sacrifice de millions d’hommes pour le pays, de nombreux monuments aux morts sont édifiés. En Finistère, on fait souvent appel au sculpteur René Quillivic. Loin de se cantonner au célèbre poilu à la baïonnette ou au coq, il a une originalité : il choisit toujours la personne du village qui a le plus souffert. Pour le monument aux morts de Fouesnant, Quillivic choisit une femme qui a perdu cinq de ses sept fils au combat.
Aujourd’hui, l’histoire perdure. « C’est une histoire qui court encore dans sa famille. Ils savent tous qu’une sculpture à son effigie est présentée ici, raconte Jérémy Varoquier. La petite fille de la femme est venue récemment. C’est toujours la même émotion. »

assiettes Porquier-Beau
Des assiettes examinées par la ligue de protection des oiseaux (lpo).

4. Des assiettes fantaisistes

La maison pour tous de Penhars accueillera une exposition en octobre dans le cadre du festival Le temps de l’arbre. Une quinzaine de planches sur le thème des oiseaux y sera exposée, en partenariat avec la Ligue de protection des oiseaux. loi, « des pièces aquarellées. Quelques fantaisies ont été prises, notamment sur la forme des becs, nous a affirmé la LPO. Ça prête toujours à sourire », déclare Jérémy Varoquier.

Publié 26 août 2022 par Carla PLOMB – Ouest-France ©

Faïencerie Henriot à Quimper : à la découverte d’un art ancestral (Ouest-France).

Durant tout le mois d’août 2022 et jusqu’en septembre, la faïencerie Henriot propose des visites guidées de ses ateliers. L’occasion de découvrir le processus de fabrication unique des célèbres faïences emblématiques de Quimper (Finistère).

Margot Henriot Quimper
Margot est la guide du jour. Déambulant dans les ateliers de la faïencerie Henriot, elle fait découvrir aux visiteurs les différentes étapes de la fabrication. Ici, le calibrage.

Margot Le Page et Emma Louveau, 22 ans, sont saisonnières à la faïencerie Henriot, à Quimper (Finistère). L’une est étudiante en droit du patrimoine culturel, l’autre en science politique. Elles assurent les visites guidées des ateliers, au-dessus de la boutique, mais aussi les démonstrations des premières étapes de fabrication des faïences.

Un art traditionnel et célébré

Eau, terre, feu : tels sont les trois éléments fondamentaux à la fabrication de faïence. Dans les allées de Locmaria, Jean-Baptiste Bousquet, le fondateur, installe son atelier en 1690, sous le règne de Louis XIV. Il y est bien logé, proche de l’Odet, de l’argile des rives et des bois alentour alors toujours existants, lui permettant d’actionner les fours. Dans les années 1950, les faïenceries quimpéroises emploient plusieurs centaines de personnes. « C’était l’âge d’or », souligne Margot. Un âge d’or bien révolu, la faïencerie comptant aujourd’hui douze salariés. Mais l’art de la faïence persiste dur comme fer. Un art traditionnel, unique et célébré.

Margot Le Page
Margot met la main à la pâte durant l’étape de l’émaillage, ce processus où la pièce est trempée dans de l’eau et de la poudre de verre.

Le petit train de Quimper, lui, arbore les motifs Henriot. « Le propriétaire du petit train est venu nous voir pour nous soumettre l’idée. On a donc peint les motifs sur faïence, puis il les a imprimés et collés sur le train, explique Fabienne Kernéis, de la faïencerie. Il a du panache ! ».

En 2023, l’atelier fêtera ses 333 ans. Un anniversaire pour le moins spécial.

peintre Henriot
L’une des peintres de l’atelier Henriot à Quimper (Finistère), à l’œuvre, sur un plat.

Un « atelier 100 % féminin »

Une quinzaine de personnes s’est réunie ce mercredi 3 août 2022 pour assister à la visite. Margot débute par le coulage, lorsque l’argile est apposée dans les moules de différentes formes, la plus célèbre étant la Sainte-Anne. Puis elle met directement la main à la pâte à l’étape du calibrage afin de créer une assiette.

Mais le passage qui attire tous les regards est celui de l’atelier des peintres. Les mains minutieuses des artistes s’attellent à décorer une à une chaque pièce. « Un atelier 100 % féminin », fait remarquer Margot. La guide demande de garder le silence pour ne pas déconcentrer les peintres, dont les têtes dépassent du cadre, entourées de pinceaux et d’éponges, à côté des pots de peinture de couleurs diverses. L’une d’elles reproduit un motif de petits Bretons en costume Glazik, l’autre des marguerites.

A. Le Bras Henriot Quimper
Une peintre de l’atelier, peignant à main levée des motifs de fleurs sur l’une des pièces.

À main levée

Les décors sont faits à main levée, « à la touche ». Les plus compliqués, cependant, « sont faits à l’aide d’un poncif ». La formation complète pour un artiste peintre dure trois ans. « Lorsqu’une peintre commence une pièce, elle la termine toujours et la signe de ses initiales. » C’est un travail qui demande du temps : la première cuisson se fait à 1 040 °C durant neuf heures.

Dans les bâtiments renfermant ce joyau d’artisanat, une question taraude l’un des visiteurs. « Pourquoi ne pas rendre la fabrication automatique ? Cela fait gagner du temps ». Margot, solide sur ses appuis, répond : « Nous ne voulons pas tomber dans l’industriel. »

Pratique : durant le mois d’août, du lundi au samedi dès 10 h 30, puis à 11 h 30, 14 h, 15 h, 16 h et 17 h. Durée de la visite 30 minutes. Tarif unique 5 €, gratuit pour les moins de 7 ans. Pas de réservation, vente des billets 15 minutes avant le départ.

Publié le 11 août 2022 par Carla Plomb – Ouest-France ©