Quimperlé accueille une exposition d’un enfant du pays. Xavier Krebs (1923-2013), figure de l’abstraction d’après-guerre, a construit son œuvre pas à pas.
Sur les bancs des écoles, tous les petits espagnols connaissent par cœur les vers d’Antonio Machado : «Caminante, no hay camino, se hace camino al andar. »
Comprenez : « C’est en marchant qu’on trace sa route. » Xavier Krebs, peintre né à Quimperlé en 1923, illustre parfaitement ces mots.
Suivons un peu les traces de cet artiste majeur de l’abstraction.
Après une enfance sur les bords de l’Aven, entre Quimperlé et le Poulguin, il s’engage à 18 ans dans les troupes françaises d’Afrique du Nord, il prend part aux campagnes de Tunisie, d’Italie, au débarquement de Provence, aux campagnes d’Alsace et d’Allemagne.
Après un court retour dans le Finistère, il part en Indochine. Reviendra avec la dysenterie et des images sombres en mémoire. Il y laissera sa foi en Dieu dans «ce lieu de ténèbres ».
Le chemin suivi par Xavier Krebs est fait de méandres, de tours et détours. Avec des étapes importantes. Comme la faïencerie Keraluc, à Quimper. «Ce sera le premier, en Bretagne, à intégrer dans la céramique des motifs abstraits », souligne Fanny Drugeon, commissaire de l’exposition à Quimperlé.
Peintre autodidacte, Krebs trouvera sur sa route des peintres qui marchent sous la bannière de l’abstraction lyrique : Degottex, Hantaï, Poliakoff, Benrath.
Dans ses bagages iconographiques, Krebs a embarqué Turner, Goya, Klee, Kandinsky, Sérusier et des primitifs italiens. Géographiquement, le peintre qui était plutôt du genre «taiseux », selon son fils Benjamin, exercera son art en région parisienne, en Touraine, puis enfin, dans le Tarn.
Ce grand marcheur, pétri de taoïsme, peintre contemplatif, aimera cheminer en Inde et dans le Sahara. Dans son parcours intellectuel, Krebs fera de belles découvertes en créant des carrefours inattendus.
Comme dans ce portait de Shimegori, par le peintre japonais Takanobu (1142-1205). Fasciné par la forme noire octogonale dans le portrait, il trouve un écho à cette figure géométrique dans Melancolia du peintre-graveur Dürer (1471-1528). Une forme transposée dans ses paysages abstraits.
Adoubé par les critiques et les galeristes, Xavier Krebs est injustement méconnu du grand public. L’exposition sur ses terres natales est l’occasion de faire un bout de chemin en sa compagnie.
« Ma peinture, écrivait-il, pourrait aussi être une mise à plat de ces espaces qui nous coupent le souffle, qui nous «naviguent », une expression de la durée et du déplacement dans l’immobilité de la toile. »
Figure du mouvement abstrait après-guerre, influencé par l’abstraction lyrique, l’art japonais, ses voyages en Inde, Xavier Krebs (1923-2013) suit un parcours original et méconnu. Né en Bretagne, il entame une carrière de peintre en 1950 à Pont-Aven, dans l’ancien atelier de Paul Gauguin. Il participe à des expositions collectives au Salon d’automne à Paris et travaille pour la faïencerie Keraluc à Quimper. Il aura successivement son atelier à Auvers-sur-Oise, puis en Touraine, pour enfin s’installer en 1977 dans le Tarn.
Aux côtés de Benrath, Degottex, Hantaï, Loubchansky… ses œuvres sont conservées et exposées dans de grandes collections muséales (Beaulieu-en-Rouergue, Lyon, Brest, Rennes, Montauban, Cahors), au Fonds national d’art contemporain, au musée d’Art moderne de la Ville de Paris.
Cet ouvrage retrace, au fil des amitiés et des admirations, les cheminements de Xavier Krebs – réels, contemplatifs, esthétiques -, et ses grandes périodes stylistiques imprégnées de philosophie orientale.
Catalogue de l’exposition de Quimperlé (Chapelle des Ursulines, Maison des Archers), sous la direction de Fanny Drugeon et Constance Boutet. Textes d’André Cariou, Françoise Terret-Daniel, Antoine Lucas, Cédric de Veigy, Françoise Livinec, Constance et Bruno Krebs. Livre broché avec rabats, 23 x 30 cm, 112 pages couleur + 100 œuvres reproduites – ISBN 978-2-36833-299-3 – Prix : 25 €
Intitulée « Cheminements », la rétrospective Xavier Krebs, initialement prévue en 2020, vient finalement d’ouvrir ses portes à Quimperlé, jusqu’au 10 octobre.
Annulée en 2020 puis reportée, la rétrospective Xavier Krebs a finalement ouvert ses portes ce samedi 29 mai. « Ce n’était pas une aventure évidente à mener, merci d’avoir tenu ». C’est avec ces mots que le maire de Quimperlé, Mickaël Quernez, s’est adressé au pôle Culture et Patrimoine de la Ville, à la commissaire de l’exposition Fanny Drugeon, mais aussi aux trois enfants Krebs, Constance, Benjamin et Bruno, qui se sont fortement impliqués dans la mise en œuvre de cette exposition.
Un lancement plus que bienvenu, après des mois de confinement. Presque un cheminement, comme le nom donné à ce parcours en trois temps : Labyrinthes, Échappées et Mémoires, déclinés chacun dans trois lieux, jusqu’au 10 octobre : la Chapelle des Ursulines, la médiathèque et la Maison des Archers.
Une quête de reconstruction
L’exposition invite le visiteur à explorer le cheminement de l’artiste à travers plusieurs espaces. On y découvre d’abord des œuvres figuratives, inspirées de paysages bretons, mais pas que. Xavier Krebs, né à Quimperlé en 1923, grandit au Poulguin, sur les bords de l’Aven. Puis, il s’engage dans l’armée en 1943 et repart presque aussitôt pour l’Indochine. Ses carnets de dessin se remplissent alors de paysages dégageant une certaine sérénité. Pour l’artiste pourtant, il n’en est rien. Il confiera avoir vécu « l’expérience de la mort ». Une expérience qui, à son retour en Bretagne, aura une forte influence sur sa peinture. « Il cherche à repartir de zéro, à se remettre du traumatisme de la guerre », raconte Fanny Drugeon. Il se reconstruit alors à la faïencerie quimpéroise Keraluc, où il explore l’abstraction sur ses céramiques, exposées à la Maison des Archers.
Des récurrences
Malgré cette évolution dans son œuvre, le travail de l’artiste est émaillé de récurrences. « Ce qui m’a frappée dans son travail, ce sont les cheminements qui impliquent des détours. Plusieurs chemins mènent au même endroit : le jardin secret que l’on a tous en soi, l’enfance », interprète Constance, la fille de Xavier Krebs. Plus que des détours, son frère Benjamin voit lui des retours en arrière. Et c’est là tout l’intérêt de l’œuvre de leur père. À travers ces récurrences, une forme noire, que l’on observe sur presque toutes les peintures, des rochers ou encore des couleurs, Xavier Krebs a mené une quête qui s’est finalement achevée en 2013, année de sa disparition. Son travail est alors plus apaisé, les couleurs plus vives.
Ce qui m’a frappée dans son travail, ce sont les cheminements qui impliquent des détours. Plusieurs chemins mènent au même endroit : le jardin secret que l’on a tous en soi, l’enfance.
Des influences multiples
Cet artiste autodidacte aimait croiser les époques, les styles et les influences. « C’était un passionné d’Histoire de l’art, de spiritualité, de nature, en plus d’être doté d’un grand sens de l’humour », décrit Fanny Drugeon. La littérature avait également une place importante dans sa vie. À la médiathèque, on retrouve les ouvrages qui l’ont inspiré et nourri, à l’instar de l’écrivain André Malraux.
De multiples influences qu’il aimait explorer au cœur de son atelier du Tarn, reproduit en partie à la Chapelle des Ursulines. Là, le visiteur peut, comme l’artiste, observer les œuvres dans leur ensemble, « prendre le temps du regard ».
Pratique
Exposition visible jusqu’au 10 octobre. Chapelle des Ursulines et Maison des Archers, de 13 h à 18 h, du 1er juillet au 31 août, de 11 h à 19 h. Fermeture le lundi. À la médiathèque, aux horaires d’ouverture. Tarifs : Pass’unique Maison des Archers – Chapelle des Ursulines : 5 € (plein tarif) ; 3 € (tarif réduit). Gratuit pour les moins de 25 ans et le vendredi. Médiathèque : entrée libre.
Avec cette exposition de l’été et de l’automne, la ville de Quimperlé (Finistère) rend hommage à l’un des siens, à l’un de ses enfants : le peintre Xavier Krebs, né à Quimperlé en 1923 et décédé à la fin de l’été 2013. Une exposition à découvrir dans trois lieux différents de la ville.
Le parcours de l’exposition présente la diversité des cheminements artistiques de Xavier Krebs. « Elle retrace l’histoire d’une démarche vers l’abstraction, la contemplation et la méditation », dit Fanny Drugeon, la commissaire de l’exposition. L’exposition se déroule dans trois lieux, qui « dialoguent entre eux et se répondent à travers des formes récurrentes, l’omniprésence des couleurs et transparences qui résonnent dans des compositions reposant sur des rapports géométriques précis. »
Labyrinthes
Dans la Chapelle des Ursulines, l’histoire est « principalement contée en peintures, des premières œuvres figuratives aux ultimes lagunes, en passant par les grands formats des années 2000 dans lesquels jaillissent les réminiscences des couleurs bretonnes. »
Une sélection d’une cinquantaine de peintures issues de collections publiques et privées est présentée suivant une ligne chronologique.
« Y sont soulignés les liens qui se tissent entre des séries parfois à plusieurs décennies d’intervalles. Le parcours est structuré par des séries telles les Signes, les Seuils ou les Lagunes », dit encore Fanny Drugeon.
Échappées
À la Maison des Archers, il est question des échappées, tant à travers les lieux que l’artiste cherche à quitter, depuis son enfance en pays quimperlois, qu’à travers les nouveaux espaces que Xavier Krebs se crée.
« Outre l’intimité de l’artiste, tels ses liens familiaux ou ses carnets, sont présentées ici ses collaborations dans une dimension architecturale, ainsi qu’une évocation de son atelier. »
Mémoires
À la médiathèque Jean-Plouët, la « dimension mémorielle est essentielle, qu’il s’agisse de la mémoire des livres et des influences littéraires et artistiques qui ont compté pour son travail, ou de la mémoire de l’artiste, telles les photographies d’Inde qui lui permettent de renouer avec son propre passé. »
Une sélection d’ouvrages provenant de la bibliothèque de Xavier Krebs est exposée, compagnons de route et sources d’inspiration.
L’ancrage familial des Krebs
Xavier Krebs est né en 1923 à Quimperlé. Il y restera jusqu’à ses 17 ans. Il a grandi dans le manoir de Poulguin, au bord de l’Aven, à Névez. Un bien familial qui a appartenu à partir de 1883, à Alix de Kergariou épouse de Pierre Hersart de la Villemarqué, fils de l’auteur du Barzaz-Breiz.
Valérie, leur fille, épouse en 1920 le frère de son amie d’enfance Marguerite, Arthur Krebs, le père de Xavier. Le grand-père de Xavier, Arthur Constantin Krebs était un militaire et ingénieur. Pionnier de l’aéronautique en 1884 avec le dirigeable La France, contribue à l’invention du bateau électrique sous-marin Gymnote.
Il a été directeur de Panhard avant de se retirer dans son domaine de la Villeneuve-Braouic. Xavier avait 12 ans à la mort de son grand-père. Autre personne importante dans sa famille, sa tante Marguerite qui a épousé Paul Paulet le créateur de la société du même nom à Douarnenez (Petit Navire).
À Quimperlé, un sentier de randonnée du côté de Keransquer et de la Villeneuve-Braouic porte le nom d’Arthur Krebs.
De multiples rendez-vous gratuits
Visites accompagnées
Xavier Krebs : à travers la peinture. Tous les vendredis à 11 h à la Chapelle des Ursulines. Durée : 45 minutes.
Xavier Krebs : dans l’intimité d’un peintre. Les mardis 6, 13, 20 et 27 juillet et les mardis 3 et 10 août, à 18 h à la Maison des Archers. Durée : 30 minutes.
Lecture pour les enfants. Les bibliothécaires racontent des histoires entre la Chapelle des Ursulines et la médiathèque, en lien avec l’univers de Xavier Krebs. Le mercredi 18 août, départ à 15 h depuis la Chapelle des Ursulines. Durée : 45 minutes. À partir de 4 ans.
Yog’art Contemplation. Une approche sensible de l’œuvre de Xavier Krebs pour le public adulte au cœur de l’exposition, en compagnie du professeur de yoga, Ywen Hervé. Les 17, 23 et 30 juin, à 10 h 30 à la chapelle des Ursulines. Durée : une heure trente.
Les ateliers
Créations colorées. Pour les familles à la médiathèque, un moment de découverte de l’exposition et de création de ses paysages de couleurs. Les mercredis 7 juillet, 4 et 25 août, à 15 h à la médiathèque. Durée : une heure trente. À partir de 6 ans.
Les rencontres
Itinéraire café. Rencontre pour le public adulte avec la commissaire d’exposition Fanny Drugeon. Une occasion unique de suivre le parcours d’exposition en trois temps. Le 13 juillet, à 15 h, à la Maison des Archers. Durée ; deux heures.
Xavier Krebs : un regard au jour le jour. Conférence grand public avec Cédric de Veigy, enseignant-chercheur en photographie et cinéma français. Le 28 septembre, à 18 h 30, à la médiathèque. Durée : une heure.
Xavier Krebs : les influences d’un peintre. Conférence grand public avec Mickaël de Saint-Chéron, philosophe des religions et écrivain. Le 6 octobre à 18 h 30 à la Chapelle des Ursulines. Durée : une heure.
Tous ces rendez-vous sont gratuits. Mais il est nécessaire de réserver sur place, au 02 98 39 28 44 aux heures d’ouverture ou par mail culture@ville-quimperle.fr
Jusqu’au dimanche 10 octobre
Les horaires
Chapelle des Ursulines et Maison des Archers : jusqu’au 30 juin et du 1er septembre au 10 octobre, de 13 h à 18 h. Du 1er juillet au 31 août, de 11 h à 19 h. Fermeture le lundi
Médiathèque : aux horaires d’ouverture de la médiathèque, jusqu’au 2 juillet et à partir du 31 août : mardi 14 h-18h30, mercredi 10 h-12 h 30 et 14 h-18 h 30, jeudi 16 h-18 h 30, vendredi et samedi 10 h-18 h. Du 3 juillet au 28 août : 10 h-12 h 30 et 14 h-18 h, sauf le mardi matin et le jeudi après-midi. Fermeture le dimanche et le lundi
Les tarifs
Maison des Archers et Chapelle des Ursulines (pass’unique) : tarif plein : 5 € ; tarif réduit : 3 € (demandeurs d’emploi, personnes en situation de handicap, groupe de 10 personnes minimum). Gratuit : pour les moins de 25 ans, les bénéficiaires du RSA et tous les vendredis.
Musée de la Faïence à Quimper
Parallèlement à l’exposition organisée à Quimperlé, l’exposition « Keraluc, une faïencerie au service des artistes », présentant notamment des céramiques de Xavier Krebs, a lieu au Musée de la Faïence de Quimper jusqu’à la fin septembre 2021.
Publication
Une publication, réalisée en coédition entre la Ville de Quimperlé et les éditions Locus Solus, accompagne l’exposition. Une centaine d’œuvres seront reproduites dans cet ouvrage. Réunis sous la direction de Fanny Drugeon et Constance Krebs, plusieurs auteurs et critiques, y contribuent : André Cariou et Françoise Terret-Daniel (conservateurs de musées), Antoine Lucas et Cédric de Veigy (enseignants-chercheurs), Françoise Livinec (galeriste), etc.
Le catalogue de l’exposition : Xavier Krebs – Cheminements ; éditions Locus Solus ; 112 pages couleur ; prix 25 €.